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Pourquoi réaliser la transition énergétique ?

Pourquoi faut-il réaliser cette transition ? Quel est le lien avec le réchauffement climatique ?

Dans le premier article de cette série (accessible ici) nous évoquions l’histoire de la transition énergétique afin d’avoir un éclairage sur les chantiers à venir. Quels sont les objectifs de la transition énergétique pour lutter contre le réchauffement climatique ?  La commission européenne a proposé des actions concrètes dans un plan nommé “Fit for 55” dont les objectifs sont les suivants :

  • Réduire les émissions de gaz à effet de serre de 55% d’ici à 2030 par rapport au niveau de 1990
  • Atteindre la neutralité carbone en 2050
Nous repartirons de ces ambitions pour aborder différents aspects de la transition énergétique.
Tout d’abord, nous chercherons à comprendre pourquoi est-il nécessaire de réduire nos émissions de gaz à effet de serre ? Puis nous évoquerons les mix énergétiques de quelques pays pour finalement faire un zoom sur la stratégie française en terme de transition énergétique. 

Pourquoi réduire nos émissions de gaz à effet de serre (GES) ?

L’effet de serre est un phénomène naturel. Grâce à la vapeur d’eau contenue dans l’atmosphère terrestre, la température sur Terre avoisine les 14°C et permet ainsi la vie. Sans elle, la planète bleue n’aurait pas d’océans et aurait une température moyenne de -18°C.

 

L’effet de serre (illustré ci-contre) est comparable à l’effet d’un sac de couchage lorsque vous campez dans la nature. Le sac n’est pas une source de chaleur mais il participe à renvoyer votre propre chaleur sur vous. Il évite les pertes de chaleur vers l’extérieur. Plus votre sac de couchage est épais, plus il vous renvoie votre chaleur et plus il est utile.

C’est ce qu’il se passe avec la Terre et son atmosphère. Plus l’atmosphère contient des gaz à effet de serre, plus elle empêche la chaleur de la Terre d’aller vers l’espace.

Schéma explicatif de l'effet de serre. / Source : [kidiscience.cafe-sciences.org]

L’effet de serre est un phénomène naturel et il permet la vie sur Terre.

L’étude de la concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère donne donc une bonne indication du fonctionnement de notre planète. Le CO2 étant un important gaz à effet de serre, il est mesuré par les scientifiques.

Une infographie de la NASA nous en donne un aperçu : on remarque que la concentration de CO2 dans l’atmosphère a toujours évolué au cours des 800.000 dernières années pour des raisons naturelles.

Evolution of the atmospheric CO2 concentration / Source: [NASA]

Il est donc vrai que la planète connait des cycles (appelés cycles de Milankovic) d’environ 100 000 ans de hausse et de baisses de la concentration en CO2. Ceci est lié à la modification des paramètres orbitaux de la Terre autour du Soleil. Ces modifications réchauffent plus ou moins la planète et cela conduit à un relargage de CO2 dans l’atmosphère, réchauffant donc la planète.

Le phénomène de dérèglement climatique actuellement en cours est différent des cycles de Milankovic en 2 points :

  • La vitesse des émissions environ 50 – 100 fois plus rapides que par le passé
  • La causalité entre CO2 et T°C. Aujourd’hui, la cause principale du réchauffement est l’augmentation des GES dans l’atmosphère.

Le pic de la concentration en CO2 (à droite du graphique) correspond à l’intensification des activités humaines depuis le début de la révolution industrielle.

Que s’est-il donc passé ?
 

Pour commencer, nos ancêtres se sont mis à utiliser le charbon pour faire tourner la machine à vapeur puis le pétrole pour faire tourner les moteurs à combustion et finalement le gaz pour se chauffer dans les villes. 

Comme brûler 1L d’essence émet 2.8kg de CO2, l’ensemble des machines utilisées par l’humanité rejette de plus en plus de CO2 dans l’atmosphère, et ce, qu’elles utilisent de l’essence, du gaz ou du charbon.

Tout cela conduit à “augmenter l’épaisseur du sac de couchage terrestre” et donc  à élever la température sur Terre.

 Brûler 1L d’essence émet 2.8kg de CO2.

Le rapport du GIEC publié en août 2021 montre avec certitude que le réchauffement actuel est causé par les activités humaines et de l’émission de gaz à effet de serre dues à celles-ci.

Ces analyses proposées par le GIEC montrent l’évolution de la température de la Terre depuis 2 000 ans. On remarque notamment que la température a augmenté  de +1.1°C depuis 1850 et des scénario prévoient +5°C d’ici 2100.

NB : Lors de la dernière déglaciation, la température a augmenté de 5°C à l’échelle du globe en … 10 000 ans. Soit un réchauffement environ 50-100 fois plus lent que l’actuel.

Pour l’illustrer, nous avons repris ci-contre des graphiques décrivant les changements de la température globale par rapport à 1850-1900. 

Le graphique de droite compare l’évolution des températures observées (courbe noire) avec les modélisations prenant en compte les facteurs naturels seuls (bleu) et les facteurs naturels et humains cumulés (orange). Il est clairement visible que la courbe des températures observées est très proche de la simulation intégrant impacts naturels et humains, alors qu’au contraire la simulation uniquement naturelle en est déconnectée.

Le facteur humain est donc le déterminant principal dans l’affaire du réchauffement de la Terre.

Figure SPM.1 de l'AR6 / Source : [traduction de la synthèse pour décideurs de l'AR6 par Yann Rozier]

Lors de la dernière déglaciation, la température a augmenté de 5°C à l’échelle du globe en … 10 000 ans. Soit un réchauffement environ 50-100 fois plus lent que l’actuel.

Afin d’atténuer autant que possible les conséquences néfastes du réchauffement de la planète, il est nécessaire de réduire les émissions de gaz à effet de serre émises par notre société industrielle.

Mais comment réaliser cette réduction des émissions ? 

Le plus vite possible.

Cette réduction doit se faire au plus vite parce que la planète s’est réchauffée de +1°C et que chaque dixième de degré compte. En effet, les phénomènes extrêmes liés au dérèglement climatique (cyclones, sécheresses, inondations) augmentent avec la température de la planète. Mais il ne faut pas oublier que des boucles de rétroactions positives peuvent se déclencher à partir d’un certain seuil de température.

C’est pour cela que la réduction doit se faire le plus vite possible. Comme il paraît improbable que l’humanité arrête ses émissions (de gaz à effet de serre) du jour au lendemain, le GIEC réalise ses analyses sur la base de scénarii nommés SSP pour Scénario Socioéconomiques Partagés (Shared Socioeconomics Pathways en anglais).

Les graphiques ci-dessous représentent l’effort de réduction pour différents gaz et particules qui contribuent au réchauffement de la planète. Il est alors intéressant de noter que les scénario qui permettent de respecter l’accord de Paris sont les courbes bleues (SSP1-1.9 et SSP1-2.6). 

 

Graphiques représentants les scénario d'émissions pour différents gaz à effet de serre
Figure SPM.4-a of R6 / Source : [Summary for Policymakers]

Les graphiques ci-dessous représentent l’effort de réduction pour différents gaz et particules qui contribuent au réchauffement de la planète.

Il est alors intéressant de noter que les scénario qui permettent de respecter l’accord de Paris sont les courbes bleues (SSP1-1.9 et SSP1-2.6). 

Comment réduire nos émissions de gaz à effet de serre ?

Notez que nous faisons le choix de ne parler que du CO2 à partir de maintenant, par soucis de longueur de l’article. Sachez cependant que l’effort de réduction doit aussi se faire sur le méthane, le protoxyde d’azote et les autres gaz à effet de serre.

Tout d’abord, regardons d’où proviennent nos émissions.

En 2010, l’humanité a émis environ 35 milliard de tonnes de CO2 dont 30 milliards proviennent de la combustion de ressources fossiles et de la fabrication du ciment.

Comme nous l’avons présenté lors de l’article sur L’histoire de la transition énergétique, ces ressources fossiles sont brûlées afin d’utiliser leur potentiel énergétique. Elles peuvent alors être considérées comme des énergies (d’origine) fossiles.

Graphique présentant l'évolution des émissions de CO2 émis par l'humanité depuis 1850
Figure RID1-D / Source : [GIEC AR5]

Les émissions de CO2 d’origines humaines (anthropiques) sont principalement dues à la combustion de ressources fossiles. Cette combustion peut servir à différents usages comme :

  • Faire avancer un véhicule
  • Se chauffer
  • Produire de l’électricité

Comparons à présent les différentes solutions pour se chauffer selon un axe particulier : la quantité de CO2 émise pour produire 1 kWh de chaleur.

Intensité carbone des modes de chauffage / Source : [Auteur sur données de l'ADEME]

Pour se chauffer, nous avons différentes solutions. Bien souvent, on se chauffe au fioul à la campagne et au gaz en ville. La raison étant simplement que le déploiement d’un réseau de gaz est plus économique en milieu dense.

Les modes de chauffage issus des ressources fossiles (fioul et gaz) sont ceux ayant l’intensité carbone la plus forte. 

Pour réduire son impact carbone tout en ayant le même service (1 kWh d’énergie à utiliser), changer de mode de chauffage est une première solution.

A travers cet exemple, nous voyons que le choix de nos sources d’énergies peut impacter fortement nos émissions de CO2. L’analyse du mix énergétique permet donc de se faire rapidement une idée des émissions de CO2 d’un pays. 

Pour rappel, le mix énergétique est la décomposition des différentes énergies utilisées par un système (souvent analysé au niveau des pays).

C’est donc par le prisme des mix énergétiques que nous pourrons aborder de la meilleure manière la question suivante : “comment réaliser la transition énergétique ?”. Quels sont les enjeux (économiques notamment) en lien avec ces mix énergétiques ? Comment ces mix ont-ils évolués au cours du temps ?

En résumé : quels sont les meilleurs leviers pour réaliser la transition énergétique ? Rendez-vous dans le prochain article pour le savoir ! 

Photo de l'auteur [Harald Lhomme]

Auteur :

Harald Lhomme

Consultant en stratégie carbone